The Owl

À l’heure où tout devient incertain,

La nuit me visite dans ses voiles blafards.

Elle se pose lentement sur moi

Et, avec une douceur infinie,

Arrache à ma chair ce qui fait de moi un homme.

 
Lorsqu’elle s’enfuira en bruissant à peine,

Elle me laissera exsangue et pantelant.

J’observerai alors mes restes frémissants

Et je verrai que c’est avec mes chaines

Que la nuit va nourrir ses enfants.



Le souffle

C’est la nuit sous les grands arbres

Quand tu viens, les pieds nus

Sans un bruit, tu tournes et tu as faim

 
Pourquoi est-ce moi que tu envisages ?

Et pourquoi te penches-tu sur moi,

Si froid et si aride, dans un craquement d’os ?

 
Moi qui suis à peine

Moi qui effleure le monde

Moi qui voulais toucher le ciel

 
Tu souffles et je m’en vais.

Au matin, c’est éparpillé sur la mousse,

Que je verrai le jour



Le monde dans une flaque d’eau

Toute cette agitation muette

La nuit quand la réalité dort

Tranquille et aveugle

Je me suis vu ramper vers elle

 
Froid comme la mort

Attiré par la lumière

Phalène avide, brutale

Ou serpent sinueux

 
Je me suis vu léviathan grandiose

Dévorer ce monde vain

De soubresauts vaniteux

Et de créatures pitoyables

 
Et puis, ne pouvant me soustraire

Au grotesque de ma condition

Puisqu’on est jamais assez grand

J’ai mis le monde dans une flaque d’eau




Le Chevreuil et l’enfant

 

Aux premières lueurs je t’entends qui rodes

Et qui te demandes encore pourquoi,

Alors que maintes fois tu aurais pu m’étouffer

Dans mon sommeil oublieux,

Tu t’es contenté de m’observer, inconscient.

 
Et lorsque j’entrevois ton ombre fuyante

Je sens ton regard lourd posé sur moi

Et qui me dit : « une autre fois je serais moins courtois 

Et je prendrais le temps de me repaître de toi ».

Depuis je bats la campagne, content d’être vivant.



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